Tout d’abord, ce que je ne ferai pas dans cet article et les suivants : vous donner une leçon de français et vous servir des termes ampoulés à effet répulsif.
Ce que je ferai : vous donner des conseils, les rapprocher de votre pratique quotidienne et surtout, vous expliquer l’effet produit par certaines expressions sur vos interlocuteurs. C’est ce qui vous intéresse le plus, me semble-t-il.
Pendant l’été, vous avez plus de temps pour lire et écouter plein de choses, et de ce fait, vous êtes beaucoup plus attentifs à certaines expressions. Pour preuve, les réseaux sociaux regorgent de questions à ce sujet : les uns se demandent s’il faut vraiment dire «y a pas de souci » pour être raccord avec leur époque, certains décrient le « bon courage » qu’ils vont entendre à leur retour de congés, etc. J’ai donc entrepris de décrypter avec vous une série d’expressions que vous ne direz plus ou n’écrirez plus. Voici votre premier épisode.
Pas de problème, pas de souci
Déjà, s’il n’y en a pas, évitez de les mettre au pluriel ! A l’oral, on ne l’entend pas, mais à l’écrit, il n’est pas rare de trouver un « s » à souci ou problème.
Le cerveau de votre interlocuteur captera inconsciemment ce mot négatif alors que votre intention était plutôt positive.
Ainsi, préférez : « A votre service », « Je vous en prie », « avec joie », « avec plaisir », autant de bonnes ondes pour mettre votre interlocuteur en bon état.
Bon courage
Si vous n’étiez pas stressé ou angoissé avant de l’entendre, là, c’est sûr, vous l’êtes ! Il annonce souvent un mauvais moment à passer, alors réservons-le pour la circonstance et n’en faisons pas un tic de langage. Pensez vos formules de sortie (conclusion d’une conversation écrite ou orale) pour montrer de la vraie empathie.
Ainsi, pour encourager vraiment votre interlocuteur, évitez de parler de courage et adaptez vos expressions à la circonstance : « Bon travail », « Bonne intégration », « Bonne suite dans vos projets »…
N’hésitez pas à me laisser un message
Cette expression est tellement utilisée… Pourtant, elle est contreproductive. Décortiquons : on a un verbe négatif, « hésiter », serti d’une forme négative. La recherche en neurosciences nous apprend (ou confirme) que le cerveau rejette la négation. Que vous reste-t-il dans ce cas ?… « hésitez » ! Ce qui pourrait expliquer, par exemple, un taux de réponse très faible lors d’un e-mailing publicitaire : je vous invite à vous poser la question en conscience la prochaine fois.
Et comme vous aimez les preuves, en voici une ; un jeune médecin chercheur m’a raconté l’anecdote suivante à ce sujet :
« Nous avons installé 2 groupes d’une dizaine de personnes dans deux salles différentes. Un petit déjeuner était servi sur la table. Au premier groupe, nous avons dit « n’hésitez pas à vous servir » et seules 2 personnes /10 se sont servies ; au deuxième groupe, nous avons dit « servez-vous » et tout le monde s’est servi ».
Ainsi, « laissez-moi votre message » sera plus efficace que « n’hésitez pas à … », vous l’aurez compris.
Je vous laisse me recontacter
Le verbe « laisser » est déjà traumatisant en lui-même, vous le reconnaîtrez. Lorsqu’il est, de surcroît, suivi d’un verbe invitant à l’action, votre interlocuteur ressent (toujours inconsciemment) un inconfort. On s’attendrait plus à entendre : « je vous laisse vous reposer » plutôt que « je vous laisse me suivre » !
Ainsi, pour inviter à l’action, préférez justement « je vous invite à me suivre », tellement plus positif et engageant.
Nous avons été impactés par…
Le mot « impact » existe bien en français ; mais le verbe « impacter » est une pure fabrication estampillée « néoparler » (langage convenu pratiqué par un grand nombre par mimétisme) et pouvant se mettre à toutes les sauces. Comment faisait-on quand on ne l’avait pas ? On disait « la grève des transports a perturbé la circulation », « la réforme a ralenti notre développement »… et nous ne nous en portions pas plus mal !
Ainsi, pour éviter d’agacer vos interlocuteurs, abandonnez l’idée d’impacter leur cerveau en appauvrissant la langue.
Je démarre une nouvelle mission
Vous lisez ou entendez ce genre de choses très souvent : « je viens de démarrer un nouveau livre, il est génial », « Je démarre le yoga à la rentrée » … sans savoir que ce n’est approprié qu’à un engin à moteur !
Ainsi, mieux vaut utiliser « commencer » lorsque vous n’avez pas une clé pour faire démarrer l’engin.
J’ai amené mon CV
A moins que votre CV soit en chair et en os, vous ne pouvez que « l’apporter ».
Ainsi, vous apporterez des choses et amènerez des êtres vivants.
Vous voulez en savoir plus ? Choisissez le parcours e-learning « Écrits professionnels : être lu et compris » (module de découverte). Comme dans cet article, retrouvez des explications factuelles pour rendre vos écrits mieux compris et plus soignés.
Objectif : vous distinguer par vos écrits pro.
Au plaisir d’avoir de vos nouvelles !
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Sylvie Azoulay-Bismuth – contactez-moi
Formatrice et spécialiste en écrits professionnels – Cofondatrice de AB LEARN Le français des pros® – Auteur des formations en e-learning Le français des pros® et de l’ouvrage « Être un pro de l’e-mail » ed. Eyrolles (nouvelle édition 01 2018)